It’s bigger than Hip Hop: une anatomie du rap vintage et contemporain en un mix de 18 titres

Par contre, de liens en liens, en démarrant par le hardcore d’Onyx, on arrivait à des créations assez désarmantes. De fait, on a abouti à un mix croisant le vintage 90s et 00s avec des choses enregistrées ces dernières années

Au départ, l’ambition était de réaliser un mix rap. Réaliser un mix ne posait aucun souci ; on avait beaucoup de morceaux en stock. Et comme pour les vêtements, chez Gabba Vintage, on aime le rap vieille école. De fait, on s’est replongé dans Public Enemy, IAM, Cypress Hill, Beastie Boys, Run DMC, House Of Pain et autres Onyx. C’était parfait à écouter et le mix a pu commencer. Sauf qu’au bout d’un moment, l’envie d’un enchaînement de titres purement old-school est passée.

Elle n’est pas à proprement parler passée ; elle s’est étiolée sous la pression de tracks contemporains. En même temps que la sélection s’opérait, de nouvelles fenêtres s’ouvraient et différentes musiques passaient dans les locaux de Gabba Vintage. Et c’était sacrément inattendu, ces sons. OK, l’impasse avait d’emblée était faite sur le morceau de base contemporain, cette recette misérable avec fond musical minimaliste et gros effets de voix auto-tunées. C’est déjà énervant d’écouter ça sourdre de voitures bloquées au feu rouge… Par contre, de liens en liens, en démarrant par le hardcore d’Onyx, on arrivait à des créations assez désarmantes. De fait, on a abouti à un mix croisant le vintage 90s et 00s avec des choses enregistrées ces dernières années.

Pourquoi ces titres?

On commence par Take That, titre des vétérans Onyx. Il date 1998 et en impose toujours autant, sa brutalité minimale est indémodable. Le disque dont le morceau est tiré est depuis longtemps posé au sommet du panthéon rap, mais pas la partie la plus éclairée.

On passe en 2012 avec Death Grips, groupe américain qui, pour le coup, s’éloigne copieusement de l’idée qu’on peut se faire du rap. On entre avec ces dingos dans les domaines de l’expérimentation et de l’indus, avec des sons très perturbés. Et ça leur plait.

Snowgoons est un collectif de hip hop allemand qui, sur ce titre de 2013, reprend les bases du rap 00s en envoyant du très lourd, avec un refrain fort hardcore – metal. Dans le genre martial, ces teutons s’imposent sans finesse aucune, et c’est parfait ainsi.

The Electric Experience, de Zillakami X Sosmula, est daté de 2020 et, pour le coup, nous ramène au temps de la fusion rap – metal de la compilation Spawn (1997). Méchant est le mot adéquat. Sombre et haineux lui collent bien aussi.

Changement de registre avec le bon Million Dan et son Mic Check, qui nous propulse dans un monde de rap ancien réactualisé, une quasi insouciance estampillée 2008 pour un titre tellement festif en comparaison du reste.

Retour à la violence et à la double caisse avec Lvcid, qui digère et recrache un paquet de codes du metal lourd avec un talent sidérant. Daté de 2016 et pourtant amené à ne jamais vieillir tant la recette est intemporelle.

Cover Gabba Vintage

On rebascule en 1998 avec le vétéran Redman et son titre sautillant, samplant, pour la millionième fois sans doute, Genius of Love de Tom Tom Club (1981), qu’on avait nous-mêmes intégré dans un autre mix, Love.

Ever Somber, de Dälek, est une chanson fabuleuse, au croisement du rap 00s et d’un groupe à guitares comme My Bloody Valentine. Très mélodique, vaporeux, ultra instrumental, c’est tiré d’Absence, l’album si intense de 2004.

On se repositionne du côté de l’excès avec Scarlxrd et son Heart Attack de 2017. La mouvance trap dans toute sa splendeur : des percus massives, du flow, de la saturation et du hurlement, et ce truc a cartonné au niveau mondial.

Bon, fallait calmer toute cette agitation, alors on a demandé à un duo de patrons, Das Efx, de venir nous entretenir du Real Hip Hop. Le mouvement de balancier de la chanson, sa simplicité, ce cool est impayable, et ce depuis… 1995 (voilà le plus ancien morceau du mix).

On reste dans le calme avec un autre duo, Fat Nick & Shakewell, lequel, sur Pemex, titre de 2020, obtient un savoureux mélange en croisant refrain obsédant sur une trame n’allant pas sans évoquer l’alarme. A noter que le clip est en lui-même une véritable œuvre, ne serait-ce que capillaire.

C’était en 2008 et sur Ninja Tunes (souvenirs) que The Bug a publié Skeng, un morceau difficile à oublier tant son dépouillement est richement mis en valeur. Où comment proposer un maximum avec peu de choses, le tout avec force reverb.

Si vous méconnaissez Ghostemane, vous découvrirez un artiste venu de la sphère metal brutal devenu rappeur à l’inspiration aussi féconde que peu limitée. Son titre, Drown (2017), n’est toutefois pas représentatif de son œuvre, pléthorique. Perturbé et tranchant comme un bon vieux NIN.

Dizzee Rascal est un autre artiste dont le morceau retenu n’est pas vraiment caractéristique de la discographie. D’ordinaire, en plus d’être doté d’une sacrée voix, le gars est cool. Sur cette bande son dure et inquiétante, il se fait prophète, pour le meilleur (Sirens a été, en 2007, un sacré hit).

Kendrick Lamar n’était pas un nom qui éveillait positivement l’attention. On y voyait encore un de ces rappeurs surdoués, millionnaires, bons pour la hype, vite oubliés. Mais ça, c’était avant de tomber sous le charme enivrant de Humble et son fichu piano (2017).

Mais qu’a pu écouter un garçon comme Jasiah (Feat-Nascar-Aloe) pour produire un brûlot aussi drôle, féroce, sautillant et énervant que Unintelligible ? Difficile à préciser exactement, comme il était improbable de tomber sur un morceau de rap de 2021 aussi déconcertant.

Dans un genre de talentueux énervant à la Lamar, Wiz Khalifa. Mais on savait que lui avait depuis longtemps truffé sa discographie de titres aussi planants et accrocheurs que ce KK de 2014. Une recette faussement facile pour un morceau réellement entêtant.

On termine par le titre emblématique de Dead Prez, Hip Hop, qui a à ce point explosé les frontières de son style d’origine qu’il est devenu plus qu’iconique, mais musique de pub. Consécration ou appropriation ? Peu importe. Ce carton audio et populaire est venu au monde en 2000. Déjà vintage.

Liste :

  • Onyx – Take That
  • Death Grips – Lost Boys
  • Snowgoons – Who What When Where
  • Zillakami X Sosmula – The Electric Experience
  • Million Dan – Mic Check
  • Lvcid – Pasteur-Shop-Rage
  • Redman – Brick City Mashin
  • Dälek Ever – Somber
  • Scarlxrd-heart-attack
  • Das Efx – Real Hip Hop
  • Fat Nick & Shakewell – Pemex 
  • The-Bug – Skeng
  • Ghostemane – Drown
  • Dizzee Rascal – Sirens
  • Kendrick Lamar – Humble
  • Jasiah – Unintelligible (Feat-Nascar-Aloe)
  • Wiz Khalifa – KK
  • Dead Prez – Hip Hop
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